Jessica se réveilla ce matin-là avec l'impression qu'elle ferait mieux de ne pas se lever. Dormir tout le jour n'était pourtant pas une solution, elle le savait. Et puis, elle ne pouvait pas se fier à une simple indication de son esprit, qui était assez tordu quand on y regardait de plus près. Prenant le temps d'émerger dans son lit, elle n'avait pas encore ouvert les yeux qu'elle cherchait son paquet de cigarettes et son briquet sur la table de chevet. Manquant de faire tomber sa lampe de chevet, elle mit finalement la main sur ce qu'elle cherchait. Elle ouvrit alors réellement les yeux, savourant les cinq premières minutes de sa journée avec délice. Peter était à Mobile pour le week-end, et sa mère s'occupait de ventes de charité, elle avait donc la maison pour elle toute seule. La bâtisse, une demeure du XVIIIème siècle, transportée pierre par pierre depuis le Pays de Galles, était immense. Elle avait un certain cachet, mais était intimidante. Cependant, Jessica avait grandi dans cette maison, et elle avait commencé à retrouver ses marques, bien qu'elle était toujours incapable de manger dans l'un des deux salons, préférant la cuisine, plus petite et plus chaleureuse. Brossant ses cheveux, elle enfila ses pantoufles et descendit au rez-de-chaussée, tel un zombie. S'asseyant sur l'un des tabourets de la cuisine, elle se demanda bien ce qu'elle allait pouvoir manger. Elle était tout simplement nulle en cuisine, une vraie calamité. C'était pour cela qu'elle prenait la plupart de ses petit-déjeuners au Bakery. Mais elle n'avait tout simplement pas le courage de s'habiller et de se traîner jusque là-bas, elle n'avait pas envie de sortir. Elle allait profiter d'avoir la maison pour elle toute seule, et lire un livre dans la bibliothèque. La pièce, bien qu'officiellement accessible à tous, était officieusement l'antre de Peter, son beau-père. C'était lui qui l'avait élevée, et lui avait transmis son amour de la littérature, ainsi que de l'écriture. La journaliste n'avait pas réellement de projet, elle était bien, toute seule chez elle. Réfléchissant désespérément à ce qu'elle allait bien pouvoir manger, elle finit par se décider pour une gaufre surgelée et mit la cafetière en route. Elle attrapa l'un des journaux posés sur la table, en l'occurrence le Wall Street Journal, et commença à lire.

Après son petit-déjeuner, Jessica jeta un coup d’œil à l'horloge du micro-ondes. Il était plus de dix heures. Elle se réfugia dans l'un des fauteuils de la bibliothèque, bien décidée à lire le nouveau Stephen King, qu'elle avait attendu avec impatience. A peine avait-elle lu dix pages qu'elle fut interrompue par le bruit de la sonnette. Elle grommela, imaginant que ce devait être probablement le facteur ou un groupe de scouts essayant de vendre des cookies. C'est bon, j'arrive ! hurla t-elle, posant rageusement son livre sur la table basse, avant de dévaler les escaliers. Elle n'avait pas spécialement envie de se faire incendier par sa mère parce qu'elle n'avait pas réceptionné l'un de ses précieux colis. C'est vrai que c'était tellement important, sa nouvelle paire de bottes ou son petit pull en cachemire ... Toujours en pyjama, démaquillée et les cheveux au vent, la jeune femme s'empressa d'ouvrir la porte, s'attendant à voir le facteur s'apprêtant à partir ... Si seulement ce n'avait été que ça ... Sa surprise fut grande, très grande. Le sourire colgate destiné au livreur se transforma subitement à la vue de Danny. Qu'est ce qu'il faisait là ? Comment avait-il su ? Salut.. Jess. Prise à la fois par la colère et la panique, elle s'empressa de claquer la porte. Grossière erreur, elle le connaissait. Il ne s'arrêterait pas là. Elle ignorait ce qu'il voulait, mais ce qu'elle désirait, c'est qu'il parte le plus vite possible. Le voir ne faisait que lui rappeler. Tout, les bons moments mais aussi les pires. Leurs disputes, la souffrance qu'elles avaient engendré ... Non, il fallait qu'elle le fasse partir le plus vite possible. Elle prenait un nouveau départ, en revenant à Newton Lake. Elle avait espéré reprendre sa vie là où elle s'était arrêtée il y a cinq ans, lorsqu'elle avait quitté la ville. La jeune femme avait rapidement constaté que les choses ne seraient pas aussi simples. Les gens avaient changé, certains étaient partis, d'autres étaient arrivés. Ses amis n'étaient plus les mêmes personnes, certaines prenant bien son retour comme Lilo, d'autres ne lui ayant pas pardonné d'être partie comme Skyler. Danny ici, ça venait foutre en l'air tout son plan. Oublier. Oublier semblait la meilleure solution. Même si cela impliquait d'oublier les meilleurs moments de sa vie. Partir lui avait brisé le cœur. Le revoir ne ferait qu'aggraver les choses, elle en était consciente.

Jess.. S'il te plait, ouvres. Faut qu'on parle. Malgré la porte qui les séparait, elle entendait la voix de Danny. Elle avait songé à attendre qu'il s'en aille, mais cela semblait risqué. Il ne partirait pas, elle en avait la quasi certitude. Elle resta un moment adossée contre la porte, avant de se décider à ouvrir. Elle fit face à Danny. Il était tellement ... beau. Elle n'avait pas envie de le voir, mais elle devait cependant reconnaître que son ex-mari était séduisant. Et elle, elle devait paraître tellement ... négligée, avec son pyjama, ses cheveux à peine brossés et sans maquillage. Pendant quelques secondes, elle ressentit une certaine honte à se montrer sous cet aspect, avant de demander, d'un ton froid : Qu'est ce que tu veux ?! Peut-être n'était-il là que pour des papiers, après tout. Leur divorce s'était fait à l'amiable, et elle n'était pas la spécialiste en droit de leur couple, elle n'avait aucune idée de ces choses-là. Comment t'as su que j'étais là ? Et toi, qu'est ce que tu fous ICI ?! Que ce soit bien clair, tu n'as PAS à débarquer CHEZ MOI comme ça ?! Nan mais t'es tombé sur la tête ou quoi ? Qu'est ce qui ne tourne pas rond chez toi ? Elle s'était emportée, bien malgré elle. Jessica avait beaucoup de difficultés à contrôler ses émotions, surtout lorsqu'il s'agissait de Danny. Et ça, il le savait. Lui seul la connaissait aussi bien. Malheureusement, chez la jeune femme, les bons souvenirs de leur vie à deux ne parvenaient pas à prendre le dessus sur les mauvais. Pas pour l'instant, elle avait trop mal. Rien que de penser à Danny la faisait souffrir. Elle avait décidé d'arrêter d'y penser. Puis, de ne pas parler de tout ce qui les avait entourés, comme la Floride, endroit qu'elle avait fuit au bout de quelques mois. Tous les endroits qu'elle fréquentait là-bas étaient liés à eux, d'une manière ou d'une autre. Au fond d'elle-même, à cet instant précis, elle le détestait. Jessica le détestait de lui faire ça, de revenir et foutre en l'air le travail qu'elle avait fait sur elle-même ces derniers mois. Parce qu'elle se connaissait, elle savait très bien comment elle fonctionnait. Et si elle ne gardait pas la tête froide, elle allait perdre le contrôle beaucoup plus vite qu'elle ne pensait.

Je t'ai dis, je viens pour parler. La lèvre inférieure de Jessica trembla. S'il y avait bien une chose qu'elle redoutait, c'était avoir à faire avec son passé. Son passé en dehors de Newton Lake. Elle avait tout fait pour ne pas y penser, et la réalité venait de lui revenir droit dans la figure. Elle aurait dû sans douter, mais ça avait été plus fort qu'elle. Elle ne pouvait s'empêcher d'être optimiste, trop optimiste. Elle ne pouvait décrocher son regard du visage de Danny. Il avait l'air beaucoup plus à l'aise qu'elle. Évidemment. Elle était un être faible, désespérément faible, qui n'avait aucune volonté. Tout le contraire de son avocat d'ex-mari, un vrai requin. Il ne lâchait jamais rien, elle était son opposé. Jess, je te connais. Mieux que personne et tu le sais. Où aurait-tu pu aller d'autres qu'ici ? Cette ville dont tu m'a tant parlé... Quant à moi... J'habite ici.. Le visage de la jeune femme se décomposa en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire. Sa première réaction fut d'éclater, encore et toujours. Et tu nous fais quoi là ? La crise de la trentaine en retard ?! Franchement, le pays est bourré de bleds paumés, il fallait vraiment que tu t'installes ICI ?! Tu veux quoi, que toute la ville se passionne de nos histoires ? Elle ne releva pas le fait qu'il s'agissait de la ville de son enfance. Elle n'y était pas née, mais elle était chez elle, ici. Et pas lui. Il n'avait pas le droit, elle était sur SON territoire. Elle avait son espace et il avait son espace. Ce n'était écrit nulle part, mais la jeune femme voyait les choses ainsi. Elle n'avait qu'une envie, c'était de lui hurler de s'en aller. Mais elle ne pouvait pas, ils étaient en pleine rue, et n'avait pas spécialement envie que tous les habitants de Newton Lake assistent à ce qui ressemblait à une scène de ménage. Ils en savaient déjà trop, ils n'avaient pas besoin d'avoir la suite, c'était stupide.

Je travaille même ici. C'est moi l'avocat du quartier maintenant. Ravie de faire votre connaissance, Jessica Howard ex Anderson. Il avait touché un point sensible. Combien de fois avait-elle rêvé par le passé du jour où on l'appellerait Mrs Anderson ? Un nombre incalculable. Du jour où elle l'avait rencontré, elle avait su. Jessica avait su qu'elle serait Mrs Daniel Anderson, la seule et l'unique. Y penser ne faisait que lui rappeler que leur mariage avait été un échec, un échec cuisant. D'un coup, elle sentit les larmes lui monter aux yeux. Elle s'empressa de les refouler. Pas question de verser une seule larme devant lui. Il ne ferait que prendre davantage conscience de l'emprise qu'il avait sur elle. Qu'est ce qu'il faut que je fasse pour que tu t'en ailles ? soupira t-elle à voix basse, avant de relever les yeux vers lui. Elle devait lui faire face, ne pas lui montrer qu'il était celui qui dominait la situation. Elle mourait d'envie d'aller vider la bar de son père. Oui, de le frapper, de lui claquer la porte au nez et d'aller boire la bouteille de scotch à deux cent dollars que Peter gardait pour les grandes occasions. Tu sais quoi, Danny ? T'es vraiment le roi des cons. Et le pire, c'est que je croyais que les choses commençaient enfin à s'arranger, et toi, tu débarques, et tu fous les six derniers mois de ma vie passés à essayer d'oublier combien j'ai mal en l'air ! Je suis vraiment une idiote, une idiote profonde. Un rictus de colère s'affichait sur le visage de la jeune femme, tandis que Danny poursuivait, toujours le sourire aux lèvres : Et tes parents alors, ils doivent être contents de te revoir. Qu'on ne soit plus ensembles surtout. Cette fois, c'en était trop. Elle se retenait d'exploser depuis quelques minutes déjà, elle ne pourrait pas s'en empêcher plus longtemps. Tant pis, ils offriraient un spectacle digne de ce nom aux habitants de Newton Lake. DÉGAGE DE CHEZ MOI !!! TU NE DEVRAIS PAS ÊTRE LA, DÉGAGE !!! Elle avait fondu sur son ex-mari, martelant son torse de coups de poings, cherchant à le faire partir, à l'éloigner d'elle.

Lentement, elle arrêta de le frapper, avant de relever le visage vers Danny. Elle essaya pendant plusieurs secondes de faire sortir un son de sa bouche, pour enfin dire : Je me déteste. Je me déteste de me mettre dans un état pareil à cause de toi, je te hais, Danny, je te hais. Jessica pensait tout à fait ce qu'elle disait. Au plus profond d'elle-même, elle le détestait. Elle le haïssait de tout son être. Pourtant, elle était incapable d'oublier. D'oublier combien elle l'avait aimé, et combien elle l'aimait encore. Mais elle ne pouvait pas revenir en arrière. Elle savait comment ils étaient. Ils se détruisaient l'un l'autre, à petit feu. Ils ne savaient pas s'aimer autrement. Cette fois, le flot de larmes se déversait, sans qu'elle ne puisse y faire quoi que ce soit. Il avait réussi, il avait gagné. Elle était tellement vulnérable face à lui, il n'y avait que Danny pour parvenir à l'atteindre ainsi. Je ne leur en ai pas parlé. Bien sûr, ils doivent savoir que nous ne sommes plus ensembles. J'arrive pas à en parler, à personne. Ils ne peuvent pas comprendre ce que je ressens, aucun d'eux ne le peut. Sa voix s'était adoucie, Jessica commençait à ne plus ressentir le besoin de s'en prendre à lui. Il lui manquait, il lui manquait horriblement. Mais il n'était pas question qu'ils recommencent leur manège. Avoue que je suis pathétique, fit-elle, éclatant de rire.

Soyons pathétiques ensembles sinon, suggéra alors Danny, faisant rire aux éclats la jeune femme. Jessica savait pourtant qu'elle ne devrait pas se laisser aller ainsi, qu'elle ne devait pas baisser la garde. Mais que pouvait-elle faire, de toute façon ? Ils étaient Danny et Jessica, ils ne pouvaient pas lutter l'un contre l'autre. Enfin, si, c'était ce qu'ils avaient toujours fait, mais c'était un combat sans fin. Ils n'avaient aucune chance de s'en sortir indemnes, ni même de s'en sortir tout court. Ils étaient tellement plus forts lorsqu'ils étaient ensembles, mais même dans de telles conditions, ils ne pouvaient s'empêcher de lutter l'un contre l'autre, pour tout. Alors, tu me laisses entrer ? Elle fit mine de réfléchir, sachant pertinemment qu'elle ne le laisserait pas dehors. Elle répondit en claquant des dents : Ai-je vraiment le choix ? La journaliste affichait un grand sourire au bout des lèvres. Elle regrettait de ne pas avoir de peignoir, elle commençait vraiment à se sentir frigorifiée. Elle ouvrit en grand la porte, s'écartant pour laisser Danny entrer, avant de la claquer et de verrouiller. Il prit un certain temps pour observer son ex-mari. Il avait beau être toujours la même personne, il semblait légèrement ... différent. Fatigué, mais pas seulement. Après tout, elle aussi, elle avait changé en six mois, un truc de dingue. Pourtant, elle avait l'impression que les choses entre eux étaient toujours pareilles. Je t'en prie, fit-elle, lui indiquant le plus petit des deux salons. Jessica avait beau fouiller dans sa mémoire, elle ne se souvenait pas que Danny soit venu ici. Évidemment, elle-même n'était pas revenue une seule fois à Newton Lake en cinq ans. Les rares fois où elle avait vu sa famille, c'était eux qui venaient la voir en Floride.

Derrière Danny, elle pénétra dans la salle de séjour, avant d'attraper la clé du bar. Elle jeta un dernier regard vers l'avocat, avant de le prévenir : A la première réflexion sur ce que je bois ou fais, tu dégages ... Non, je ne déconne pas ! Elle ne serait qu'à moitié étonnée qu'il ne la prenne pas au sérieux. Finalement, elle ouvrit l'armoire dans laquelle étaient rangées les bouteilles de son père, attrapa la bouteille de scotch à laquelle elle songeait depuis maintenant un moment, puis deux verres, avant d'en tendre un à Danny. C'est tout ce que mon père boit, à part du jus d'orange, dit-elle, ne sachant pas s'il aurait préféré autre chose. Elle s'assit à son tour, se demandant ce qu'elle pouvait bien lui dire. Il y avait tellement de choses qu'elle aimerait lui dire, à lui, comme sa vie ici, mais aussi sur ce qu'elle ressentait. En réalité, elle ne cessait de ressentir des flots d'émotions contradictoires. Jessica mourait à la fois d'envie de se jeter dans les bras puissants de son ex-mari comme elle avait envie de prendre la fuite en courant. Je ne sais même pas par quoi commencer ... bredouilla t-elle, regardant le fond de son verre. Affronter le regard de Danny pouvait devenir extrêmement difficile. Elle savait qu'elle n'avait pas fait une croix sur eux. Oh, elle l'aurait voulu, mais elle en était incapable. Mais elle se refusait de parier sur eux en tant que couple. Ils ne savaient faire qu'une chose, se détruire l'un l'autre. Elle était arrivée à un point où elle ne supportait plus de les voir, elle et lui, se déchirer. Elle était devenue incapable de se regarder dans le miroir, sachant que non seulement il souffrait, mais elle aussi. Lentement, elle releva la tête vers Danny, avant de murmurer : On dit que l'on fait du mal à ceux que l'on aime, mais on oublie toujours de dire qu'on aime ceux qui nous font du mal. Cette phrase était lourde de sens, elle le savait.

Ne vas pas penser que je ne t'aimais ou que je ne croyais pas en nous, parce que ce n'est pas vrai. Bon sang, je ne sais même pas comment je suis censée agir ... Les mots lui manquaient. Jessica n'était pas douée pour exprimer ses sentiments, même si avec Danny, elle avait progressé, après être partie de loin, très loin. J'ai ... j'ai essayé. De t'oublier, je veux dire, poursuivit-elle. Tout ça, c'était trop dur pour elle. Il avait besoin d'explications, elle le savait. Elle aurait tant aimé pouvoir lui dire tout ce qui traversait son esprit, tout ce qui la tourmentait dans l'histoire. ... Mais je vois bien que c'est impossible. C'est fou, chaque petite chose, même la plus futile, m'en empêche. J'aimerai me libérer, je me dis que nous serions tous les deux bien plus heureux si c'était possible ... Elle se leva, puis articula : Mais ça ne l'est pas. Et en même temps, je ne vois pas d'autre possibilité. T'as vu ce qu'on est devenus ...

Peut-être y avait-il encore un infime espoir pour eux ? Peut-être qu'ils s'étaient sabordés eux-mêmes ? Jessica ne savait plus réellement. Tout me ramenait à toi. Les émissions de télé, que tu adorais et que je détestais, mais que finalement, j'acceptais de regarder pour toi. La rue par laquelle on passait tous les jours lorsque l'ont courrait. Le restaurant où l'ont s'est dit « Je t'aime » pour la première fois. Et puis tant d'autres choses. C'est là. C'est à ce moment là que j'ai décidé qu'il fallait que je retrouve, quitte à me faire du mal. J'ai tout quitté, mon boulot, l'appart', les potes, pour venir ici. Elle aurait aimé pouvoir songer avec délice à toutes ces fois où ils s'étaient battus pour avoir la télécommande, où il finissait par céder et regarder L'incroyable famille Kardashian avec elle, ou n'importe quelle émission assez stupide pour qu'elle constitue un divertissement aux yeux de la jeune femme. Elle aurait aimé pouvoir imaginer, se représenter dans son esprit la rue dans laquelle ils avaient l'habitude de courir, de se chamailler, de se mettre au défi, tout comme elle aurait voulu tout simplement se rappeler leur restaurant à eux, leur vie à eux. Au lieu de ça, elle eut la sensation de recevoir comme un coup de poignard. Non. Il ne pouvait pas. Se rendait-il compte que c'était du suicide d'être venu la retrouver ? Jessica pouvait bien souffrir, c'était son problème, mais il était hors de question d'entraîner une fois de plus Danny dans cette spirale infernale. Elle devait le protéger, le préserver. Elle avala d'un coup son verre, qu'elle avait jusqu'à présent à peine touché. Elle sentit alors le liquide glissait dans sa gorge, la brûlant au passage. Elle espérait y trouver du courage. La journaliste voudrait le laisser partir. Elle avait essayé, mais ils étaient pires que des aimants. Étaient-ils maudits ? Jessica finissait par se le demander. A moins qu'ils étaient condamnés, condamnés à s'aimer.

Danny ... commença t-elle. Elle avait besoin de lui. Jessica avait besoin de lui, elle le ressentait au plus profond de son âme. Mais avait-elle le droit de ne penser qu'à elle ? Certainement pas. MERDE ! Elle se leva d'un coup, pour faire les cents pas dans la pièce. Elle n'arrivait plus à réfléchir, tout se bousculait dans sa tête, il se passait beaucoup trop de choses ... Elle allait exploser, non pas contre Danny, mais contre elle-même. Elle ne s'y retrouvait plus, elle ne savait plus ce qu'elle devait dire ou faire. Il n'y avait que des mauvaises décisions, dans leur cas. S'ils retentaient leur chance, elle le ferait souffrir de nouveau. Dans le cas contraire, elle pouvait être sûre qu'elle le blesserait aussi. Et dans tous les cas, elle aurait mal, elle continuerait d'avoir mal. J'ai ... j'ai besoin de toi, je ne veux pas te laisser partir, pas cette fois, mais ... Et encore une fois, elle allait fondre en larmes, elle était prête à le parier. Elle devrait réellement faire attention à ne pas se laisser submergée par ses émotions. Pas avec ce qu'elle essayait de lui dire. J'ai pas le droit de ne penser qu'à moi. Je ... t'aime trop pour ça, pour agir de manière aussi égoïste. Crois-le ou non, c'est par amour que je suis partie. Jessica avait fini par attraper les mains de l'avocat. Elle en avait le cœur brisé, de le regarder entendre ce qu'elle lui disait. Elle aurait aimé que toute leur vie, ils restent enfermés dans cette maison, préservés du monde extérieur. Le seul défaut dans son plan était qu'il n'y avait aucun moyen qu'ils se préservent d'eux-mêmes. Je suis désolée, désolée d'agir ainsi. Mais toi et moi savons que cela ne changera rien, hum ? Elle fixa un moment ses yeux bleus, ses yeux si bleus. Elle pouvait y voir tout ce que devait ressentir Danny à cet instant.

C'était une mauvaise idée, tout ça était vraiment une mauvaise idée, commença t-elle à dire, très vite, au bord du délire. Sa voix traduisait son état d'hystérie, de panique totale. Elle continuait de tenir les mains de Danny dans les siennes, ne se rendant pas compte de la pression qu'elle exerçait. Comme si elle voulait le retenir, l'empêcher du lui échapper encore des doigts. Puis, elle sentit le goût salé des larmes s'écrasant sur ses lèvres. Et voilà que je recommence à pleurer, si ça ce n'est pas la totale ... Il devait en avoir marre de la voir fondre en larmes, à la longue. Elle ne faisait que ça, depuis qu'elle l'avait rencontré sur le pas de sa porte. Jessica se détestait au plus profond d'elle-même. Elle n'avait pas à lui faire endurer tout ça. T'aurais dû monter plus vite dans ce taxi le soir où l'on s'est connus, ça t'aurais évité de foutre ta vie en l'air en t'amourachant de la garce que je suis, bafouilla t-elle, toujours le regard fixé sur ses yeux. Ses magnifiques yeux. Elle aurait aimé pouvoir regarder ailleurs, mais ce n'était plus possible. Elle ne pouvait plus faire marche arrière, plus maintenant. Tout était trop tard pour elle.

La réaction de Danny fut tout sauf ce à quoi Jessica s'attendait. Il jouait le jeu jusqu'au bout. J'aurai même du éviter de venir dans cette foutue université, à cette heure là, j'serai parti vivre en France, avec une femme, des enfants et un labrador. La jeune femme manqua de se retrouver les fesses par terre tellement elle riait. Elle en oubliait presque ses larmes tellement son fou de rire était incontrôlable. Il avait le don de rendre les choses plus légères, de lui faire oublier la situation. Elle ne parvint pas à dire quoi que ce soit avant de calmer en tant soit peu son fou de rire, avant de le regarder et d'articuler : Désolée mais c'est trop drôle de t'imaginer en père de famille pantouflard, avant de reprendre de plus belle. Si seulement les choses pouvaient toujours être ainsi. Finalement, elle arrêta de rire, reprenant son sérieux. Et si tout ça n'était jamais arrivé, je n'aurai jamais pu faire ça. Et là, elle n'eut pas le temps de protester, ou ne serait-ce qu'en placer une, qu'il l'embrassa. Jessica tenta brièvement d'opposer un minimum de résistance, mais elle savait que toute lutte serait inutile, ce ne serait que se mentir à elle-même, encore. Elle aurait voulu que cela dure le reste du temps, mais Danny rompit leur baiser. Quoi, c'était mieux dans tes souvenirs ? le taquina t-elle, tandis qu'elle observait son air troublé. Ses doutes semblaient s'être envolés. Après tout, était-elle obligée de se prendre la tête avec ça aujourd'hui, en ce moment-même ? N'avaient-ils pas le droit de profiter de l'instant présent, était-ce trop demander ? Elle s'aida de ses mains pour se relever, le sourire aux lèvres. Dis.. tes parents vont pas revenir hein ? Si ils me trouvent là, ils vont me tuer je crois. Il riait, et elle aussi.

C'est presque mignon de ta part, fit-elle remarquer, s'imaginant en effet si ses parents étaient là à l'instant même. Peter resterait silencieux, tandis qu'Alice ... elle ne savait pas réellement ce que Mrs Howard dirait. Évidemment, elle n'avait jamais approuvé leur histoire, c'était à cause d'elle qu'elle avait coupé les ponts avec toute la famille, mais elle semblait, à sa manière, se soucier réellement du bonheur de sa fille. Nan, sérieusement ... Mon père est en voyage d'affaires, il ne rentre pas avant au moins lundi, et ma mère est à l'origine de j'ne sais encore quelle œuvre caritative ... je crois que c'est pour l'alphabétisation ou un truc comme ça, bref, elle doit être en grande conversation avec les autres potiches de la ville, elle ne reviendra pas avant au moins un moment je crois, s'exclama t-elle, riant de nouveau en imaginant toutes les poules pondeuses de Newton Lake échangeant sur les derniers potins. C'était tellement sa mère, tout ça. Elle aimait les mondanités, organiser des réceptions dans leur grande maison, des collectes de fond en faveur de l'alphabétisation, de la culture ... C'était elle qui perpétuait la tradition. Même si elle ne voulait pas de cette vie-là, elle respectait sa mère et ses choix. Jessica connaissait son passé, elle savait qu'elle avait connu la précarité et l'avait élevée seule jusqu'à ce qu'elle rencontre Peter. Elle parvenait plus ou moins à comprendre pourquoi elle était satisfaite d'une vie pareille, emplie d'hypocrisie et de protocoles en tout genre. Logiquement, elle aurait dû prendre la relève après elle, mais elle n'en avait pas envie. Sa mère avait probablement dû l'accepter et finalement trouvé l'une de ses sœurs plus compétentes pour cela. Jessica rendit son sourire à Danny. Comment pouvait-elle résister de toute façon ?

Elle vint s'assoir sur l'accoudoir du fauteuil. Elle savait que sa mère se serait arraché les cheveux la voyant faire, décorer la maison des Howard étant l'un de ses passe-temps favoris, mais elle s'en fichait, de toute façon elle n'était pas là pour regarder. Tu sais, la seule personne qui te déteste réellement ici, c'est ma mère. Peter ne dit rien ... parce que c'est Peter, il évite de la contrarier c'est tout. Elle pense juste que je suis ... trop jeune, trop immature sans doute. Elle pensait que je me laissais aveuglée, et elle n'avait pas tout à fait tort. Ce qu'il y a, c'est qu'elle n'avait pas compris. Elle n'avait pas compris que ce n'était pas une simple passade pour moi, que ce n'était pas éphémère, au contraire. J'imagine qu'elle croyait faire ce qui était le mieux pour moi ... Jessica affichait un regard navré. Elle était réellement navrée vis-à-vis de sa mère. Elle s'était trompée sur toute la ligne, et le pire, c'est qu'elle ne s'en rendait même pas compte. Elle aurait tant aimé lui ouvrir les yeux, lui faire comprendre. Mais c'était peine perdue. Allez, assez parlé de mon INCROYABLE famille, fit-elle en souriant, souhaitant ne pas basculer de nouveau dans le mélodrame. Elle se laissa lentement glisser de l'accoudoir contre Danny. Le sentir contre elle lui faisait un bien fou. Elle finit par l'entourer de ses bras, blottissant sa tête dans son cou, prenant une grande bouffée de son parfum. Qu'elle était bien, à cet instant. Elle aurait voulu que cela dure toute la vie. Ne bougeant pas d'un pouce, elle murmura, peu sûre d'elle : Tu crois vraiment qu'on mérite une seconde chance ? Ce que je veux dire, c'est que tu penses qu'on est capables de ne pas tout foutre en l'air comme la dernière fois ?

Jessica était toujours de nature pessimiste, le genre de personne qui voit le verre à moitié vide. Elle aurait tendance à dire que Danny était son opposé en tous points, surtout celui-là. Bien sûr qu'on l'a mérite. Et... quand on veut, on peut. Jess, je ne me vois pas repartir sans toi maintenant. Toi & moi contre le reste du monde, comme on dit, non ? Elle lui prit la main, entrelaçant ses doigts entre les siens, avant de répondre : Oui, toi et moi contre le reste du monde, on devrait avoir l'habitude maintenant. Pourtant, quelque chose chiffonnait la journaliste. Il parlait de ne pas repartir sans elle ... Il avait l'intention de quitter la ville ? Jessica n'avait pas l'intention de partir, pas cette fois. Elle avait trop de dommages à réparer ici, par rapport à sa famille, à Skyler ... Dans tous les cas, sa vie était ici désormais. Elle avait un travail, un toit, sa famille ... Elle aimait les grandes villes, mais être auprès d'eux semblait le plus important. Elle n'avait pas réalisé à quel point ils lui avaient manqué avant de revenir ici. Mais ce n'était rien à côté de la détresse qu'elle avait ressenti lorsqu'elle avait quitté Danny, qu'elle avait été loin de lui. Elle était si bien, blottie contre lui, dans ses bras. Elle se sentait comme en sécurité face au monde extérieur, tant qu'elle serait dans ses bras, rien ni personne ne pourrait l'atteindre. Je t'aime... Elle porta la main de l'avocat à ses lèvres, avant de répondre : Pas autant que je t'aime. Oui, dans le genre gnangnan, il n'y avait pas pire, mais elle était sincère. Elle l'aimait plus que sa propre vie. Elle se rappelait toutes les fois où elle était encore endormie et qu'il lui chuchotait des mots doux au creux de l'oreille. La plupart du temps, elle dormait comme un bébé, mais il arrivait que ce soit l'inverse, que ce soit elle qui le réveille ainsi. J'espère ... que tout ira bien cette fois, dit-elle doucement. Elle ne voulait pas reproduire les mêmes erreurs, elle ne voulait pas lui faire de peine encore.

Puis soudain, elle l'entendit rire pour une raison qu'elle ignorait. Elle tourna la tête vers lui, interloquée, lâchant, l'air frustré : Quoi ? Ce à quoi il répondit : Tu sais, quand je suis arrivé ? Oui, quand il était arrivé et qu'elle lui avait claqué la porte au nez. Jessica avait réellement paniqué en le découvrant sur le seuil de sa porte. Il était la dernière personne qu'elle pensait voir ici, elle l'imaginait être passé à autre chose, enchaînant les conquêtes ou avec une fille cent fois plus sexy qu'elle à son bras, et surtout loin de Newton Lake, trou paumé coincé quelque part entre Mobile et Montgomery. Hum ? fit-elle, ne sachant pas vraiment où Danny voulait en venir. Tous les voisins nous regardaient, comme si on allait se tuer tous les deux et qu'ils voulaient assister au crime. Si seulement maintenant ils nous voyaient comme ça... Au moins, ils pourraient parler de choses intéressantes entre eux. Elle pouffa. Jessica voyait bien qu'il était nouveau en ville, il n'était pas encore habitué à ça. On est au fin fond de l'Alabama, tu t'attendais à quoi ? C'est bien la seule distraction qu'ont ces pauvres gens, si tu comptes rester, tu t'y habitueras bien plus vite que tu ne penses. ... Franchement, je pense que si j'avais réussi à ne pas faire ma chouineuse, je t'aurais tué avant que tu n'aies pu t'expliquer, répondit-elle d'un ton sarcastique. Ce à quoi elle ajouta : Et puis, ça ne date pas d'aujourd'hui. Ma famille a toujours été au centre des commérages, à cause de mon père, de son ex et leurs enfants, ma mère et moi qu'il a ramené ici du jour au lendemain ... Bon, c'est clair qu'ils m'ont dans le viseur depuis que j'ai treize ans, et que ça ne s'est pas arrangé avec mon retour en ville. Depuis son adolescence, elle était au centre des conversations. De part ses fréquentations, son attitude, son amitié explosive avec Skyler ...

Mais il y a des choses qu'ils ne nous enlèveront pas, déclara t-elle, apparemment sûre d'elle. Au fond, elle l'était beaucoup moins qu'elle n'en avait l'air. Ici, les rumeurs pouvaient détruire beaucoup de choses. Mais, elles pouvaient courir, ces rumeurs, Jessica s'en fichait éperdument. On n'a pas à partager avec eux, soupira t-elle, se blottissant davantage contre le torse de Danny. La vie reprendrait son cours plus tard. Pour l'instant, elle n'avait plus envie de se prendre la tête, elle avait juste envie de rester là. Ils étaient seuls au monde, et c'était tellement mieux ainsi. Oubliées, toutes les bonnes résolutions qu'elle avait prise en quittant Danny, ou en lui claquant la porte au nez. J'ai encore moins de volonté qu'avant, fit-elle remarquer en riant, faisant allusion au fait qu'elle lui avait claqué la porte, ne voulant plus rien avoir à faire avec lui. Allez, je veux savoir ce que j'ai manqué ... Ce que tu as fait, les gens que tu as rencontré, le boulot, les soirées, tout ...

T'es sûre que tu ne veux plus que je m'en aille ... ? non, que je "Dégage de chez toi" comme tu me l'as dis plusieurs fois ? A ces mots, la jeune femme protesta, mi-amusée mi-frustrée, se blottissant davantage contre lui. Pas question, je ne vais quand même pas prendre le risque de crever de froid, lui répondit-elle, sur le même ton qu'il avait employé. Évidemment que Jessica ne voyait pas qu'en Danny un substitut à la couverture chauffante qu'elle n'avait pas. Mais ça l'amusait de prétendre le contraire, et il en avait pleinement conscience. Toujours en train de se lancer des piques, de se provoquer. C'était tellement eux, se titiller, se chamailler sans arrêt. C'était leur mode de fonctionnement, se battre pour mieux se réconcilier après. Par où commencer... ? Alors d'abord, tu vas encore te moquer de moi mais.... tu sais, mes potes ..? Ils t'aimaient bien hein. Bah... je leur ai dis que c'est moi qui était parti..... Jessica fermait les yeux, essayant de se représenter ce que Danny lui décrivait, avant d'être prise d'un fou de rire. Elle savait que son ex-mari avait une grande fierté, mais quand même ... Elle n'avait peut-être aucune volonté, mais il n'avait pas beaucoup de courage, du moins pour ces choses-là. Ils se souviennent de moi autrement que bourrée ? fit-elle, amusée. Elle se souvenait de lorsqu'ils sortaient tous ensembles en soirée, et qu'elle essayait de se faire accepter. Autrement dit, boire autant qu'eux, sauf qu'elle n'avait pas vraiment la même résistante à l'alcool que ces hommes. Danny sembla ignorer sa remarque, continuant sur sa lancée : Oui oui, je t'entends bien rire... Un jour peut être, ils sauront la vérité. En tout cas, ils étaient bien tristes pour moi. Alors, ils m'ont sorti. Mais pendant deux mois, ça n'a servi à rien, je ne regardais aucune autres filles que toi. T'étais tout le temps dans ma tête. Je t'aime, tu le sais.

Ça m'étonne de toi, Danny Anderson. Quand on s'est connus, t'étais l'archétype du gars qui avait toujours une belle fille à son bras, fit-elle remarquer, levant les yeux au ciel. Bien sûr, elle le taquinait, mais elle pensait réellement ce qu'elle disait. Lorsque Jessica avait connu Danny, il n'était pas du genre à vivre de grandes et longues histoires d'amour, elle non plus d'ailleurs. Elle aurait probablement continué ainsi si l'épisode du taxi n'avait jamais eu lieu. Mais parfois c'était un peu... dérangeant. Puis le boulot, j'avais plus le gout au travail. Alors j'ai laissé passé, deux, trois, puis six cas. Et un jour, j'ai eu un déclic. Tu étais quasiment sorti de ma vie, je me suis repris un peu en main. Et surtout, les copains en ont eu marre de me voir comme ça. Ils m'ont sortis, m'ont faire reprendre du poil de la bête comme on dit. Et puis, ils voulaient qu'on se retrouve eux aussi. C'est en parti grâce à eux que je suis avec toi en ce moment même. D'ailleurs, ça fait un mois que je t'observe de chez moi. Elle fronça les sourcils, bien que sa mère s'acharnait à lui faire perdre cette mauvaise habitude, qui l'enlaidirait selon elle. Comment avait-elle pu ne pas s'en rendre compte ? Les filatures, les investigations, c'était un peu son boulot. Elle aurait dû s'en apercevoir. A croire que depuis qu'elle était revenue à Newton Lake, elle avait baissé sa garde. Elle se contenta de répondre : Si je ne te connaissais pas, je t'aurais pris pour un taré. Jessica souriait. Je te voyais courir les matins. Jamais je n'ai osé te rejoindre. Et aujourd'hui, j'ai pris mon courage à deux mains. J'ai bien fait finalement, non ? Bon... J'attends tes questions maintenant. Il savait qu'elle avait toujours un tas de questions à poser. C'était pour cela qu'elle était devenue journaliste, à cause de sa curiosité maladive, ainsi que de sa passion pour l'écriture. Mouais mouais ... commença t-elle, forçant le ton, déclenchant le rire de Danny. Dis, pourquoi ... C'est moi qui suis partie, pourquoi t'être acharné ? Ce que je veux dire, c'est que n'importe quel homme aurait laissé tomber, même amoureux. Je suis loin de mériter toute cette attention. Et ne me dis pas que je suis exceptionnelle, ça ne prend pas avec moi, précisa t-elle d'un ton enjoué, esquissant un sourire navré.

Bon, et toi alors ? Raconte moi, dans les moindres détails. Jessica tourna légèrement de biais son visage vers Danny, avant de commencer à parler. Et bien ... Déjà, je suis partie à l'hôtel. Pas genre hôtel chic, genre hôtel familial. J'ai continué à aller au boulot, mais contrairement à toi, j'ai plus ou moins arrêté de parler à mes amis. J'ignore s'ils savent où je suis en fait. Tout ça me rappelait trop de choses, à quel point il manquait quelque chose, quelqu'un. Puis, vers fin Septembre, j'en ai eu ma claque. Dure journée de boulot, tu ne peux plus supporter ton chef de rédaction, bref, j'ai donné ma démission. Et c'est allé plus loin, puisque j'ai décidé de quitter Miami. L'atmosphère était trop lourde, j'avais besoin ... je ne savais pas vraiment sur le moment, tu vas trouver ça bizarre mais, tu sais que je crois aux signes, ouais ouais, c'est ça, moque-toi de moi ! Bref, suite à ça, j'ai pris un billet d'avion pour Montgomery et je suis revenue ici, c'est même pendant le trajet en bus que j'ai rencontré Nate ... Et avant que tu ne dises quoi que ce soit, il n'y a RIEN entre nous. On sort se changer les idées quand ça ne va pas, on boit un verre, on joue au bowling, lui aussi a du mal à se réintégrer ici. Sinon, je suis revenue chez mes parents, ils n'ont pas vraiment demandé d'explication, mais tu peux être sûr qu'ils en meurent d'envie. J'ai recommencé à voir des gens comme Lilo - tu sais, la fille des Aspens, ma baby-sitter de quand j'avais 7/8 ans, la gérante de Frannies, ou Skyler, ce qui est plus compliqué, je t'ai déjà parlé d'elle. J'essaie ... de recoller les morceaux avec elle. Je n'ai pas été une super amie en me barrant pendant cinq ans, et ce qu'elle a entendu sur moi n'était pas joli joli, ici je dois certainement passer pour la brebis galeuse de la famille. Et j'ai trouvé du boulot, je m'attendais à devoir pousser sur Mobile, mais j'ai eu cette place au journal ici, un gros coup de chance qu'ils cherchaient quelqu'un. Ce n'est pas aussi excitant que ce que je faisais à Miami, ici les seuls évènements étant des galas et des barbecues, mais il faut bien que je sorte de cette maison de temps en temps. Et sinon, je vois pas mal Lizzie, tu sais, la fiancée d'Adam, mon cousin, ceux qui vont se marier ... Oui, la costumière ... Voilà. Elle avait la gorge sèche à force de parler. Elle marqua une pause avant de demander : Alors, satisfait ?

Jessica se sentait mieux. Elle avait pu vider son sac. Il n'y avait qu'avec Danny qu'elle se sentait capable de le faire. Elle ferma les yeux un moment, profitant de la chaleur de ses bras tant qu'elle le pourrait. Il faudrait bien qu'un jour, ils sortent d'ici. Si seulement on pouvait rester ici éternellement ... Pas de commère pour espionner nos moindres faits et gestes, pas de travail, pas de responsabilités ... soupira t-elle. Oui, elle le savait, il leur faudrait bien revenir à la réalité à un moment donné. A présent, elle était capable de les voir, les bons souvenirs. Certes, les mauvais étaient toujours aussi présents, mais elle arrivait à se souvenir, de ces batailles d'eau et de liquide vaisselle, de ces course-poursuites à travers l'appartement, de ces paris stupides, des fois où il l'emmenait danser alors qu'il détestait ça. Elle se tourna complètement vers lui. Je suis désolée, murmura t-elle, passant ses doigts aux ongles vernis dans sa barbe naissante. Je suis désolée d'être partie, de ne pas avoir essayé de sauver ce qu'on avait encore, je suis désolée d'être aussi lâche, de ne penser qu'à ma petite personne, je ne te mérite pas une seconde. Mais je suis bien trop égoïste pour te lâcher une seconde fois, tu gâches ta vie avec moi mais j'ai tellement besoin de toi, que je suis incapable de prendre sur moi et de te dire que c'est fini.

Stop.. arrête de t'excuser. Bien sûr que non, je ne gâche pas ma vie avec toi. Jess', tu te rends compte de ce que tu dis ? On vient juste de se retrouver, et si je ne te connaissais pas tu m'aurai sûrement fait fuir. Je ne sais pas si on peut appeler ça de l’égoïsme, moi j'appellerai plutôt ça de l'amour, dit Danny en haussant le ton. Elle essayait de protester, mais il l'en empêchait. Et moi non plus, je ne veut pas te lâcher, je ne veux plus jamais te quitter. J.A.M.A.I.S tu m'entends ? On se ferait bien trop de mal une seconde fois pour faire cela. Je ne veux plus que tu souffres, pas à cause de moi. Jessica baissa les yeux. C'était bien beau ce qu'il disait, mais la réalité était tout autre. La vie était remplie de difficultés qu'ils n'étaient pas assurés de parvenir à surmonter. Si elle avait été capable de lui dire de partir, encore une fois, elle l'aurait fait. L'amour qu'elle lui portait était démesuré : elle voulait le protéger de tout, y compris d'elle-même. Mais elle était incapable de se montrer assez forte pour l'éloigner d'elle et du mal qu'elle pouvait lui infliger. Puis, d'un coup, elle se sentie soulevée, puis reposée par terre. Elle avait l'habitude d'être une petite chose fragile dans les bras de Danny, pourtant elle continuait d'être surprise. Jess', tu as quelques choses à manger pour moi s'il te plait ? Je commence à avoir faim. Elle hocha de la tête et fila vers la cuisine, revenant avec une panière pleine de fruits, probablement une des seules choses mangeables dans cette maison. Faudrait vraiment que je me décide à aller faire des courses, fit-elle remarquer avec un sourire. L'une des seules choses qu'on lui demandait était d'approvisionner la maison. Chose qu'elle repoussait, encore et encore. D'un coup, elle ressentit le besoin de sortir, de prendre l'air. Elle baissa les yeux sur son pyjama. Il faudrait d'abord qu'elle se décide à prendre une douche et mettre une tenue décente.

Jess, tu me fais visiter ? Je suis curieux de voir où tu as grandie... Où tu as fait tes premiers pas, où tu as couru pour ne pas que tes parents t'attrapent, à quel endroit tu as dessiné sur les murs... La maison était quoi, un musée ? Un peu. Ok. Je ne veux pas te décevoir, mais ce n'est pas ici que j'ai fait mes premiers pas, mais c'est tout comme, ajouta t-elle, songeuse. Elle avait passé quasiment les deux premières années de sa vie à New York, dans une chambre de bonne quelque part au fin fond de Brooklyn. Jessica n'en avait aucun souvenir, elle était trop jeune, mais sa mère le lui avait raconté. Une partie de sa vie dont elle ne se souvenait absolument pas, envolée. Bon, je te fais la petite histoire avec ? demanda t-elle en le prenant par la main et l'entraînant hors de la pièce. Donc ... la maison a été construite au XVIIIème siècle, elle était à l'époque au Pays de Galles. Mes ancêtres l'ont faite déplacer pierre par pierre jusqu'ici, à Newton Lake. De nombreuses générations se sont succédées depuis, mais la configuration est restée intacte. Traditionnellement, chaque épouse a décoré et personnifié la maison lorsqu'elle y a emménagé. Ce qui est d'ailleurs le cas lorsque ma mère a épousé Peter, elle a fait retirer toute la vaisselle, les tableaux choisis par Isabelle, et a embauché un décorateur d'intérieur pour l'aider à choisir de nouvelles pièces dans le grenier, expliqua t-elle, se surprenant elle-même de se souvenir d'autant de détails. Jessica ne s'était jamais passionnée par l'histoire de sa famille, mais elle se devait de la connaître. Elle lui présentait les pièces au fur et à mesure : le salon d'été, où étaient données les réceptions, le salon d'hiver, la cuisine, les différents bureaux, chambres et salles de bains, pour terminer par la bibliothèque. Le clou du spectacle, commenta t-elle avec un sourire. Cette pièce lui correspondait tellement. Simple, confortable et chaleureuse.

Finalement, tenant toujours Danny par la main, elle l'entraîna dans le jardin, l'immense jardin, que sa mère appelait d'ailleurs parc. Tu voulais voir où je me cachais pour pas que mes parents m'attrapent ? fit-elle avec un sourire, ce à quoi il acquiesça. Jessica l'entraîna avec lui, ne s'attardant pas sur la terrasse, la piscine, les massifs de roses, les arbres ou même la clôture, lui indiquant rapidement l'emplacement où ils étendaient le filet de tennis, l'été. Après plusieurs minutes de marche, ils arrivèrent tous les deux face à un immense arbre, très certainement vieux de plusieurs centaines d'années. Elle leva les yeux, reconnaissant malgré les branches et les feuilles qui avaient poussé une cabane de bois. C'est mon père qui l'a faite. Je me souviens, ma mère n'était pas d'accord, elle avait trop peur que je me casse quelque chose en y montant ou en y descendant, mais pour une fois, il ne l'a pas écoutée, il l'a construite quand même. Aussi loin que je me souvienne, c'est toujours là que je suis allée lorsqu'on se disputait, je savais qu'elle n'oserait pas venir me chercher tout en haut, expliqua t-elle, nostalgique. Jessica n'avait pas lâché sa main une seconde depuis qu'ils avaient quitté le salon. Sans doute qu'elle avait peur de le lâcher à jamais. Dis, tu as eu le temps de visiter la ville ? J'imagine que oui, mais si tu veux, je pourrais t'emmener dans les bonnes tables de la ville et tout ça, un de ces jours. Et j'ai aussi un tas de personnes à te présenter, tu verras, ils sont formidables ... Au fait, du coup, tu habites où en ce moment ? Un jour, ils revivraient peut-être ensembles, mais la jeune femme ne pensait pas que ce soit une bonne idée pour le moment. Tout était encore trop fragile. Et vivre ici, bien qu'il y ait des inconvénients, lui permettait de conserver un certain équilibre mental. Elle frissonnait, dans sa veste de pyjama. Il caille, fit-elle remarquer, serrant les dents. Elle regrettait de ne pas avoir pris un pull, pourtant elle savait qu'il ne faisait pas spécialement chaud en plein mois de Novembre.

J'habite dans un appartement à Dickens Road. Il est plutôt sympa même si parfois la solitude, c'est pesant. J'y passe le moins de temps possible. Je te le ferai visiter un jour. Elle écoutait Danny avec intérêt, essayant de s'imaginer l'endroit où il vivait, un endroit qui lui ressemblait. Le quartier était assez sympa, convivial, moins pompeux que Magnolia Road. Le genre d'endroit où l'on faisait plutôt des barbecues et des soirées pizzas que des bals et autres mondanités. Un endroit qui correspondait davantage à la jeune femme et à ce qu'elle aimait. Le genre de lieu où vivaient davantage des familles pleines d'enfants que des riches qui roulaient en Mercedes. Et, l'avocat semblait s'ennuyer, seul dans cet appartement. Comme elle dans cette maison, dans cette ville. Newton Lake n'avait rien à voir avec des villes comme Miami, New York ou Boston. Le changement était quelque peu violent. Je pense qu'à deux, on devrait trouver un moyen de contrer l'ennui, fit-elle remarquer, un sourire malicieux aux lèvres. Deux êtres fascinés l'un par l'autre, voilà ce qu'ils étaient. Fascinés aussi bien psychologiquement que physiquement. Jessica ne doutait pas un seul instant qu'ils s'ennuient à deux, en cinq ans de vie commune, elle ne s'était jamais lassée, dans le lit conjugal comme pour le reste. On aura notre endroit à nous, un jour, déclara t-elle, plus confiante en leur avenir. Bien sûr, elle continuait de douter, mais qui ne doutait pas ? En tout cas, elle voulait y croire. Croire qu'un jour, ils retrouveraient ce qu'ils avaient perdu, et seraient capables de le conserver. Croire qu'un jour, ils auraient une maison à eux, quelque part dans cette ville ou même ailleurs.

Il lui donna son sweat-shirt lorsqu'elle se plaignit d'avoir froid. Jessica ne put réprimer un sourire devant tant d'attention, jetant un « merci » tandis que son visage disparaissait sous le tissu, pour finalement ressurgir de la capuche. Elle se dit qu'elle devait avoir un look d'enfer, entre le pyjama et le sweat, mais tant pis, avoir un peu moins froid comptait davantage à ce moment-là. Tiens. Par contre je veux quelque chose en échange... Elle remarqua le grand sourire du jeune homme. Il allait voir ce qu'il allait voir. La blonde se mit sur la pointe des pieds pour atteindre les lèvres de Danny, beaucoup plus grand qu'elle. Les lèvres de la jeune femme étaient glacées, mais elles ne tarderaient pas à se réchauffer, elles aussi. Elle embrassa fougueusement son ex-mari, passant ses bras autour de son cou, tandis qu'elle sentait les siennes descendre dans son dos. Elle aurait aimé s'abandonner à l'ivresse de ses baisers, mais Jessica avait d'autres projets pour eux. Brusquement, elle se détacha de lui, avant de le fixer quelques instants, amusée. A bout d'haleine, elle lâcha : Faudra m'attraper si tu en veux plus ... Elle eut à peine le temps d'achever sa phrase qu'elle détala comme un lapin, sachant que Danny était beaucoup plus rapide qu'elle à la course, se rappelant le nombre de fois où ils avaient fait leur jogging ensembles, et la manie qu'il avait de ralentir pour qu'elle se sente moins inférieure à lui. Elle riait aux éclats, se concentrant sur sa course, sachant qu'elle aurait tout au plus quelques minutes de répit avant qu'il ne la rattrape. Évidemment, elle n'attendait que cela, mais l'adrénaline montait en elle, elle ressentait une légère pression à l'idée qu'il ne la capture de nouveau dans ses bras.

Mais, elle avait un avantage considérable sur lui : elle connaissait bien mieux les lieux, pour y avoir vécu et surtout grandi. Elle traversa d'une traite le jardin, pour finalement rentrer dans la maison. Danny était sur ses pas, elle le regardait en riant, luttant pour ne pas ralentir sa course. Jessica riait comme lorsqu'elle était enfant, tout cela était un jeu. Mais un jeu bien plus intéressant que lorsqu'elle avait six ans. Elle gravit les marches quatre à quatre, faisant un vacarme pas possible avec ses bottes, tandis qu'elle regardait Danny au travers de la cage d'escalier. S'il avait connu l'endroit plus tôt, cela aurait fait longtemps qu'il l'aurait rattrapée. Il n'avait qu'elle pour point de repère, elle était à sa merci. Et elle continuait à rire, telle une folle. Finalement arrivée en haut, elle courut dans le long couloir, hors d'haleine. Mais son ex-mari était plus rapide, et elle se retrouva dos au mur. Cernée. Elle releva la tête, toujours aussi amusée, examinant Danny, les deux mains contre le mur, ce qui ne lui laissait aucune possibilité de fuite. Il avait gagné. Alors ... je suis prise au piège ? fit-elle en gloussant. Mais elle savait que ce n'était que le début de quelque chose d'encore plus excitant ...

Je crois bien que oui... On aurait pu couper la tension sexuelle entre eux au couteau. Jessica se savait prise au piège et elle était aux anges. Il l'embrassa de nouveau, tandis qu'elle glissait sa main sur la joue du jeune homme, renforçant ainsi leur étreinte, alors qu'ils inversaient leurs places. Elle sentit les lèvres de Danny parcourir sa mâchoire, avant d'arriver au niveau de son oreille. Je t'aime, Jessica, tu m'as manquée, chuchota t-il, au plus grand plaisir de la jeune femme. Moi aussi je t'aime, t'imagine pas à quel point c'était dur d'être loin de toi, commença t-elle, ne pouvant achever sa phrase qu'il l'embrassait de nouveau. Tout allait très vite. Il l'aidait à retirer son sweat, tâche plus que facile étant donné qu'il était beaucoup trop grand pour elle. Puis, il s'attaqua au haut de pyjama de la jeune femme, qui se retrouva bien vite par terre. Jessica n'avait plus froid, loin de là. Ce fut à son tour de retirer ces bouts de tissu encombrants, en commençant par le tee-shirt de Danny, lui laissant ainsi tout le loisir d'admirer ce torse velu qu'elle connaissait si bien. Ses mains parcouraient le dos de l'avocat au fur et à mesure qu'il la couvrait de ses baisers. Elle se sentait comme en feu. Comme toujours, ils étaient en parfaite symbiose. Puis, la jeune femme se retrouva de nouveau contre le mur, tandis qu'elle parsemait le cou, puis le torse de son ex-mari de baisers, avant de se libérer d'une main experte de son bas de pyjama. Après tout, ils avaient encore de nombreuses heures devant eux, ils pouvaient bien laisser traîner leurs vêtements dans toute la maison, ce n'était pas bien gênant.

Mais tout n'alla pas comme c'était prévu. Jessica et Danny se raidirent lorsqu'ils entendirent le bruit d'un claquement de portière. Une portière de voiture. Elle réfléchit, se rappelant que la femme de ménage ne venait pas le samedi, ni le jardinier. Ce ne pouvait donc être qu'une personne ... sa mère. Merde ! lâcha t-elle, tandis qu'elle entendait la clé tourner dans la porte. Sans lui laisser le temps de dire quoi que ce soit, elle attrapa le bras de Danny, ainsi que leurs vêtements, et se dirigea vers la salle de bain, au bout du couloir. Dans le meilleur des cas, ils avaient deux minutes avant que sa mère ne se rende compte qu'elle n'était pas toute seule. Et elle n'avait pas envie qu'elle apprenne ainsi qu'elle reprenait son histoire avec Danny. Non qu'elle voulait le cacher, seulement, elle voulait le lui annoncer d'ici quelques semaines, voir quelques mois, autour d'un dîner chez Frannie's ou quelque chose comme ça, pas en les surprenant en plein ébat dans sa propre maison. Désolée d'en arriver là, mais ce n'est absolument pas le bon moment, chuchota t-elle, paniquée. Elle espérait seulement qu'il ne considérerait pas qu'elle cherchait à le cacher, telle une adolescente. Non, c'était juste que ce n'était absolument pas le bon moment. Il serait très probablement furieux dans les jours qui suivraient. Il lui en voudrait pour ce qu'elle s'apprêtait à faire. Mais elle ne pouvait pas laisser Alice Howard apprendre les choses ainsi. Elle lança son tee-shirt à Danny, avant d'ouvrir la fenêtre. Il y a à peine deux ou trois mètres de haut, encore désolée mais cette fois, tu dégages vraiment, déclara t-elle le plus sérieusement du monde, tandis qu'elle renfilait son pyjama. Jessica n'avait pas le temps de s'étendre sur les raisons qui la poussaient à agir ainsi, il devait juste partir.

Ma puce, je suis rentrée ! entendit-elle alors. Jessica déposa alors un rapide baiser sur les lèvres de Danny, avant de sortir de la salle de bain, poussant la porte au passage. Jessica, t'es là ? Paniquée, elle dévala les escaliers, criant : OUI OUI, JE SUIS LA ! Elle se retrouva finalement nez-à-nez avec sa mère, qui la dévisageait. Elle ne trouva rien de mieux à dire que : Je m'apprêtais à prendre une douche. Elle continua à la dévisager, avant de soupirer. Tu es toute pâle, tu es sûre que ça va ? Elle hocha la tête, avant de bredouiller : Tu m'as surprise, c'est tout. Je ne t'attendais pas avant au moins trois heures de l'aprem' ... Oui, et bien, on a fini plus tôt que prévu, je t'ai même pris des beignets au Bakery's ... Elle continuait de hocher la tête, pensant déjà à ce qu'elle dirait à Danny la prochaine fois qu'elle le verrait ...

THE END.